LE MOT DU PRÉSIDENT – 64
Le Mot du Président
Enfin, la loi sur le droit à la déconnexion vient d’être votée ! Il faut vraiment avoir fait l’ENA ou n’avoir jamais travaillé, l’un n’excluant pas l’autre, pour imaginer un tel règlement ! Bien sûr, lorsque vous allez travailler parce qu’il « faut bien gagner sa vie », que vous avez un travail répétitif et sans intérêt et que votre principal souci est d’attendre patiemment l’heure de rentrer chez vous, cette mesure est inutile.
En revanche, si votre travail vous passionne et que vous êtes tellement impliqué que vous emmenez du travail à la maison, répondez à vos emails et décrochez votre téléphone professionnel le week-end, cette loi vous concerne ! A cette époque lointaine où je travaillais dans la même grande Société que vous, il m’arrivait très souvent, en tondant la pelouse le samedi, de penser à mon travail, d’échafauder des stratégies et d’avoir des idées que je m’empressais de noter sur un bout de papier. Lorsqu’en 1995 sont apparus les premiers téléphones portables, que notre DRH appelait « fil à la patte », j’appelais cela « progrès » car cela me permettait de joindre mes collaborateurs ou collègues où qu’ils soient et nous facilitait la vie. Dès que j’ai eu un ordinateur portable, je préférais faire certaines tâches dans le calme de ma maison –les propositions d’augmentation annuelle, par exemple- plutôt qu’au bureau, où j’étais souvent dérangé.
En 1989, lorsque ma maison était en construction, le carreleur arriva un matin, manifestement soucieux. Il me dit « j’ai mal dormi cette nuit car je me demandais comment j’allais m’organiser pour le carrelage du séjour, où commencer, faire un tapis ou non… ». Ce serait aujourd’hui, je lui répondrais « Mais, Ramon, il fallait vous déconnecter ! »
Comment imaginer, lorsque vous êtes en phase de proposition internationale ou de négociation d’un Contrat avec un pays ou le Client travaille le dimanche ou durant les vacances françaises, que vous ayez envie d’appliquer votre « droit à la déconnexion » ? Je n’aurai pas l’outrecuidance d’évoquer ici un important contrat perdu par TAS avec un pays du Golfe parce qu’il n’y avait pas de décideur de haut niveau en août…
Récemment, un très proche qui travaille aux propositions techniques chez TAS, s’appliquait, chez sa belle-mère, un dimanche, à répondre à des questions techniques sur son ordinateur portable. A aucun moment, je ne l’ai entendu réclamer le « droit à la déconnexion ». Cela m’a rassuré. Malgré le dogmatisme et la méconnaissance des réalités du travail de certains politiques et/ou syndicalistes, le pragmatisme et l’intérêt pour le travail et la réussite perdurent…
Francis Fraikin